Psy Cause France en 2013
Lors de l’AG du 20 septembre 2012, il était prévu dans le cadre des nouveaux statuts : une organisation associative internationale constituée de Psy Cause International et de déclinaisons nationales de deux types : des structures nationales autonomes responsables de leur gestion et liées par convention, et des « sections nationales », structures décentralisées dans Psy Cause International. L’ensemble s’appelant, comme décidé à Siem Reap en novembre 2012, le « Mouvement Psy Cause ».
Lors de la réunion du 25 octobre 2012 (Comité de Rédaction + Conseil d’Administration de Psy Cause International), il fut décidé : « pour être en phase avec la logique nationale qui se met en place dans d’autres pays, nous avons individualisé une « section Psy Cause – France ». Laquelle a besoin d’un référent. » Mr Yves Chmielewski, psychologue clinicien dans le Vaucluse et rédacteur, se porte volontaire et est nommé à l’unanimité. La problématique était de mettre fin à l’assimilation qui nous venait des pays étrangers entre « Psy Cause France » et « Psy Cause International ». Cette confusion était préjudiciable à une véritable dynamique internationale nécessaire au soutien de la revue francophone Psy Cause. Le premier pas a donc consisté en une démarche essentiellement symbolique, celle de regrouper les adhérents français de Psy Cause International dans une section nationale française. Rappelons qu’en cette fin 2013, nous avons également à Psy Cause International des adhérents qui résident au Canada, en Côte d’Ivoire, au Cameroun, au Cambodge et au Portugal.
Pour le moment, il n’y a pas l’utilité d’aller plus avant dans la spécialisation de la section Psy Cause France. En cette année 2013, le projet national mis en route dans le cadre de Psy Cause France et copiloté par les Drs Jean Louis Griguer et Jean Paul Bossuat, est le colloque sur les états limites au Château de Rochegude au nord d’Orange (qui se déroulera le 29 mars 2014 et dont le programme régulièrement actualisé est à lire en page d’accueil du site). Ce projet national a été ouvert à des communicants étrangers qui en ont fait la demande (de Montréal et de Yaoundé). Comme cela peut se passer dans d’autres déclinaisons nationales de Psy Cause.
L’état des lieux de Psy Cause France en 2013 peut, comme en Côte d’Ivoire, être lisible au travers d’une recension des articles français proposés à la publication dans les prochains numéros de la revue Psy Cause.
Article N°1. Le Dr Bernard Hubert psychiatre psychanalyste à Marseille nous propose un texte à paraître dans le N°65 : « Réflexions sur le meurtre d’Althusser ». Il débute ainsi son article : « Après le passage à l’acte et l’internement qui l’a suivi, Althusser décide de raconter son drame, d’autant que vu l’état mental dans lequel il se trouvait au moment des faits, un non-lieu fut prononcé qu’il compare à l’équivalent d’une pierre tombale de silence qui vient le recouvrir. Prenant la plume quelques années après le drame en 1985 il espère pouvoir reéxister en tant que sujet, lui le théoricien de l’effacement du sujet, du procès sans sujet de l’histoire. Le non-lieu le rend captif d’un acte qui l’abolit comme sujet. Dans l’essai autobiographique qu’il entreprend alors d’écrire, L’Avenir dure longtemps, il nous raconte ce qui s’est passé : « Tel que j’en ai conservé le souvenir intact et précis jusque dans ses moindres détails, gravé en moi au travers de toutes les épreuves et à jamais – entre deux nuits, celle dont je sortais sans savoir laquelle, et celle où j’allais entrer, je vais dire quand et comment : voici la scène du meurtre telle que je l’ai vécue. (…) » » Le récit détaillé et l’analyse de ce témoignage sont donc à lire dans le N°65 de Psy Cause.
Rappelons que le Dr Bernard Hubert n’est pas nouveau dans Psy Cause puisque déjà en janvier 2006, il communiquait dans le colloque «La parole et le médicament» que nous co-organisions avec l’association de formation permanente de l’hôpital Édouard Toulouse à Marseille (AFRET). Sa communication fut alors publiée dans le N°43 pages 15 à 18 de Psy Cause, à lire sur le site.
Article N°2. Mme Annabelle Montagne est une étudiante originaire de Nîmes qui nous a soumis un résumé de son mémoire de master 1 de psychologie, alors qu’elle concourait pour le master 2. Son travail intitulé « Le syndrome d’identité diffuse dans la psychogénèse des états limites », a été accepté pour une publication dans notre revue. Il va faire l’objet d’une communication dans notre colloque de Rochegude sur les états limites. Il pourra donc paraître dans le numéro consacré aux Actes de cette manifestation scientifique. Elle situe les états limites dans une clinique particulière : « L’hypothèse d’une intégration du moi plus aboutie chez le sujet état-limite que celle des psychotiques, mais qui n’atteindrait pas l’intégration du moi névrotique, constitue la base du champ d’investigation de cette clinique spécifique dont les marges sont dites « à la limite du conceptualisable » par Green. » Son travail utilise le concept d’identité diffuse dont elle écrit : « Élaboré par Erikson à partir de son travail avec les adolescents, ce syndrome regroupe toutes les perturbations liées à l’impossibilité d’élaborer l’espace interne créatif. Cet espace est la résultante du moratoire (délai de maturation prévu), potentiellement balisé et institutionnalisé par exemple sous forme de rites de passage par la société. La qualité de sa constitution conditionne la possibilité de synthèse des remaniements identitaires et identificatoires mâturants propres à la période de l’adolescence, qui mènent à un sentiment d’identité. » Précisons que Mme Annabelle Montagne a réussi son concours et est entrée en master 2 à l’université de Besançon.
Article N°3. Mr Didier Terrisse est infirmier de secteur psychiatrique au Centre des thérapeutiques physiques et sportives Pierre de Coubertin du Centre Hospitalier de Montfavet. Il nous propose un article qu’il a modifié selon les demandes du Comité de lecture, désormais approuvé par ce dernier en vue d’une parution, intitulé : « Sophrologie et psychiatrie : quel intérêt pour la santé mentale ? ». Il écrit dans son introduction : « Il n’y a rien de plus étranger à l’entendement humain qu’un esprit malade dans un corps sain. Toute personne atteinte d’une psychose est amputée, en partie, d’une relation et d’une communication adaptée à autrui. Si l’on s’en réfère à la psychopathologie, la psychose se caractérise par l’incapacité à vivre de façon différentielle, par l’indistinction du sujet et de l’objet, l’absence des limites du Moi et par l’indistinction entre pulsion, réalité, fantasme. Penser comme possible que la sophrologie permette à la personne atteinte d’une pathologie mentale, par un retour dans le corps, l’acquisition, ou plus humblement, l’expérimentation d’un Moi Corporel, la réunification d’une identité d’être humain, telles sont les possibilités que semblent offrir la Relaxation Dynamique du 1er degrés (R.D.I) que l’on appelle encore ‘’Vivance Phronique de la corporalité’’ ou encore ‘’Corps sensations’’. » Cet article s’inscrit dans la tradition de l’écriture infirmière au Centre Hospitalier de Montfavet, très présente dans Psy Cause lors des premières années de la revue.
Article N°4. La Dr Lisa Dehandschoewercker, psychiatre au Centre Hospitalier de Montfavet, propose à la publication dans la revue Psy Cause un article intitulé : « L’expression de la douleur en psychiatrie ». Elle constate que la douleur physique ne concerne les psychiatres que depuis très peu de temps : « Il faudra attendre les années 2000 pour que la psychiatrie s’intéresse enfin à la problématique de la douleur. Les premiers articles recueillis sur le sujet datent de 2004. Des Centres d’Évaluation et de Traitement de la Douleur (CETD) se créent, les établissements psychiatriques se dotent progressivement de Comités de Lutte contre la Douleur (CLUD). Des journées nationales, ayant pour thème la prise en charge de la douleur en Santé Mentale, s’organisent depuis 2005. Au niveau gouvernemental, il faudra attendre le troisième plan de lutte contre la douleur (2006-2010) pour entendre parler de la douleur chez les personnes vulnérables. »
Articles N°5 et N°6. Il s’agit de deux articles que l’on peut qualifier de « franco-africains » puisque correspondant à des études menées en France par des professionnels de l’Afrique Subsaharienne en collaboration avec des professionnels français.
Le premier article a pour auteur principal le Dr Corentin Nascimento, rédacteur de notre revue au Niger, détaché en France à l’université de Besançon dans le cadre du DFMSA (Diplôme de Formation Médicale Spécialisée) de psychiatrie. Cet article associe deux étudiants français en DES de psychiatrie dans cette même université. Il propose une étude réalisée au Centre Hospitalier de Vesoul : « Dépression et conjugopathie dans le département de la Haute Saône : une étude rétrospective, observationnelle, à travers une population hospitalière intersectorielle ».
Le second article concerne un autre terrain : le Centre Hospitalier Spécialisé de Saint Rémy, également en Haute Saône. Cette fois ci le Dr Corentin Nascimento s’est positionné derrière un auteur principal togolais, sensibilisé par lui à Psy Cause, le Dr Saliou Salifou, médecin des forces armées togolaises qui étudie la psychiatrie à Besançon afin de devenir psychiatre au Togo. Le texte proposé s’intitule : « Café, tabac et effets indésirables neurologiques des antipsychotiques : Quel lien ?» Le terrain de l’étude est une unité de réinsertion de patients psychotiques. Tous les psychiatres qui ont exercé en milieu hospitalier français ont constaté ce phénomène addictif chez des patients neuroleptisés. Les auteurs relèvent que ces associations potentialisent les effets indésirables et nuisent gravement à la santé. Mais ils ne pensent pas qu’il soit aisé d’y remédier dans le milieu institutionnel : « Malheureusement ces substances semblent être fortement tolérées dans les hôpitaux psychiatriques et le tabagisme, quant à lui, a même été intégré dans des méthodes de gestion comportementale. »
Il est à noter que nous n’avons pas pris en compte dans cette présentation de Psy Cause France en 2013, les communications françaises au congrès d’Ottawa qui relèvent de l’activité de Psy Cause International et qui s’intègreront en fin d’année 2014 dans le numéro de la revue Psy Cause consacré aux Actes de cette manifestation scientifique au Canada.
Au total, Psy Cause France, après avoir longtemps été le cœur de notre revue, est désormais un maillon du réseau international Psy Cause. Nous pouvons faire le constat que des professionnels étrangers font le déplacement en France pour communiquer dans un colloque national et qu’un rédacteur étranger peut susciter des articles correspondant à des études de terrain en France. Et de surcroit, notre rédacteur nigérien sensibilise en France un étudiant en psychiatrie togolais qui est à présent retourné au Togo, où il va exercer comme psychiatre. Entré au comité de rédaction, ce dernier va se rapprocher en 2014, nous dit il, de Psy Cause Cameroun pour prendre connaissance du fonctionnement de cette association et fonder en 2015 Psy Cause Togo. Notons aussi que quelque soit la crise de la psychiatrie française depuis quelques années, essentiellement à l’hôpital sous les effets conjugués d’une démographie médicale en chute libre et d’une gouvernance qui ne favorise plus guère les initiatives dans le soin, la clinique française conserve son attrait et une revue comme la nôtre doit être attentive à ses spécificités. Psy Cause France devra être parmi nos priorités en 2014.
Jean Paul Bossuat